Dossier Maurice Rollinat

 

MAURICE ROLLINAT DANS LA PRESSE

Portrait de Maurice Rollinat par Catherine Réault-Crosnier.

 

Le Figaro

Mercredi 14 mars 1883

Page 6.

(Voir le texte d’origine sur Gallica.)

 

 

REVUE BIBLIOGRAPHIQUE

(…)

POÉSIE, LITTÉRATURE

Nous n’avons plus rien à dire sur M. Maurice Rollinat, dont le livre : Les Névroses, vient de paraître chez Charpentier. La névrose est un mot nouveau, et une manie nouvelle. Tout est névrose pour le moment. La vérité, c’est qu’en lisant l’étrange livre de M. Rollinat, l’esprit est frappé en même temps que de son incontestable talent, de la persistance d’une idée fixe et maladive ; la mort horrible, les planches du cercueil, le bruit des croque-morts, les épingles du linceul, le ver de la tombe, tout ce qui est horrible et répulsif y est rimé, et rimé avec une étonnante richesse par le poète. Pour être juste, il faut ajouter que quand M. Rollinat veut peindre le charme et les grandes beautés de la nature il est aussi éloquent que les plus éloquents.

Le hasard aime les antithèses ; en même temps que M. Rollinat s’efforce de faire jaillir de son cerveau les rimes les plus opulentes. M. Louis Tridon publie chez Ghio, et la lui dédie, une brochure intitulée : De la création du véritable vers blanc et du véritable poème en prose ; assonnances, consonnances, allitérations, etc., tout y est étudié avec le plus grand soin. Mais j’avoue que je doute du succès de ce genre de poésies en France et je confesse que quand je vois rimer horreur avec ange, fantastique avec souris, je me prends à regretter la rime pauvre de miséricorde avec hallebarde ; au moins dans cet exemple ai-je la consolation de trouver trois lettres pareilles, mais si à hallebarde on substitue bâton de sucre d’orge, je commence à douter des charmes de la poésie.

(…)

Philippe Gille.

 

Remarques de Régis Crosnier :

– 1 – Philippe Gille (né le 10 décembre 1831 à Paris, décédé le 19 mars 1901 à Paris) est un critique littéraire et artistique, auteur dramatique et librettiste. Il a été élu à l’Académie des Beaux-arts en 1899 (https://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb122040509). En tant que journaliste, il a aussi écrit sous le pseudonyme « Le Masque de Fer » (https://cths.fr/an/savant.php?id=121866).

– 2 – En ce qui concerne la brochure de Louis Tridon, voici la présentation que nous pouvons lire dans Le Tintamarre du 3 avril 1883, page 6, rubrique « Bibliographie » (le même jour que la présentation du livre de Maurice Rollinat Les Névroses) :

« Signalons, à la librairie A. Ghio, un opuscule très original de M. Louis Tridon, un jeune poète dont nous avons eu récemment à nous occuper à l’occasion d’un précédent volume : Chardons et Myosotis.
Cette plaquette nouvelle est intitulée : De la création du véritable vers blanc et du véritable poème en prose, et s’adresse, cela va sans dire, aux seuls délicats littéraires.
M. Louis Tridon est un amoureux de la forme et un chercheur consciencieux et infatigable de rhytmes anciens. A ce point de vue, son dernier ouvrage est d’une lecture des plus intéressantes. »

Les personnes qui voudront approfondir la poésie de Louis Tridon et en particulier la notion de « vers blanc », pourront lire l’article « Les « Jeunes » – Profils littéraires – Louis Tridon » d’Alphonse Coutard, paru dans Le Coup de feu n° 2, octobre 1885, pages 15 à 19, et / ou le chapitre consacré à Louis Tridon par Albert Savine dans son livre Les étapes d’un naturaliste, Impressions et critiques, (Nouvelle librairie parisienne, E. Giraud et Cie éditeurs, Paris, 1885, 303 pages), pages 184 à 195.